Yitro, le beau-père de Moché, avait sept prénoms ; l’un d’eux était « Yéter », qui signifie « supplémentaire ». Rachi sur le premier verset de notre paracha rapporte que ce nom lui a été donné parce qu’il mérita d’ajouter toute une section à la Torah, il s’agit de la section où il proposa à Moché un nouveau système judiciaire – dans lequel Moché déléguera les « petites affaires » à d’autres juges – pour remplacer celui déjà en place – dans lequel Moché devait gérer chaque cas. Ce prénom fait donc la louange de Yitro.
Toutefois une question peut être soulevée sur le commentaire de Rachi. En effet, la section où débute la critique de Yitro commence au verset 17 « Ce que tu fais n’est pas bien », et pourtant Rachi appui son commentaire sur le verset 21 lorsque Yitro propose une solution « Et tu verras et choisiras parmi tout le peuple, des hommes éminents, craignant D.ieu… Pourquoi ne pas rapporter le verset qui marque le début du dialogue entre Yitro et Moché ?
Ce passage de la Torah vient faire l’éloge de Yitro qui mérita d’ajouter une section dans la Torah. Or les quatre premiers versets de sa proposition ne sont pas des propos positifs, ce sont des critiques quant aux problèmes du système existant. Ce n’est qu’au verset 21 qu’il suggère une nouvelle approche. Le mérite de Yitro n’est pas sa capacité à blâmer (il est très facile de décrier sans donner d’idée constructive pour améliorer les choses), mais il est félicité pour l’alternative avancée.
Ceci nous enseigne une leçon importante. Il n’est pas nécessaire d’avoir de grandes qualités pour voir les points négatifs d’une situation ou d’une personne. En revanche, savoir comment rectifier les problèmes présents demande une capacité à penser de manière positive, constructive.
La critique peut être utilisée pour le bien et pour le mal. Cela peut être un défaut ou une qualité. Pour qu’elle soit correcte, il faut qu’elle soit vectrice de changement, d’amélioration. Pour savoir si une personne fait bon emploi de ses remarques, il suffit d’analyser sa manière d’agir et ses motivations : essaie-t-elle d’améliorer les conditions de l’autre ou bien cherche-t-elle à grandir et parfaire sa propre situation ?
Yitro eut un esprit contestataire qui lui permit de se demander s’il vivait réellement dans le Vrai et s’il le recherchait sincèrement. Et quand il reconnut la véracité de la Torah, il adhéra à cette Vérité, ne ménagea aucun effort pour changer complètement son mode de vie et pour rejoindre le peuple juif.
L’opinion personnelle est très importante dans l’étude de la Torah et dans la vie en général. Le judaïsme ne prône pas l’acceptation aveugle de tout ce que l’on entend, sans se poser de questions et sans chercher à comprendre et à approfondir. Une personne de nature critique en arrivera plus facilement à la Vérité. La critique accompagnée d’un œil positif est une base qui permet d’accomplir des changements bénéfiques dans le monde. Yitro réalisa que le système judiciaire était problématique, mais il ne se contenta pas de le blâmer – il chercha et trouva une solution.
Puissions-nous apprendre des exemples de Yitro et ainsi utiliser notre esprit critique de manière constructive.