Les faits s’éclairent les uns les autres

De sa condition d’esclave, Yossef devient intendant de la maison de Potifar. Injustement
condamné et emprisonné, il est nommé responsable de ses codétenus.
Un matin, il se lance dans l’interprétation des rêves de l’échanson et le panetier du Pharaon.
Yossef se fait alors remarquer pour ses facultés d’analyse des songes, il est appelé par le
Pharaon pour tenter d’interpréter ses rêves qui le tourmentent.
La capacité de Yossef à révéler ce qui n’est pas accessible à l’entendement de Pharaon et
les solutions pratiques qu’il en tire font de lui, à l’unanimité, l’homme de la situation, il est
nommé premier ministre.
Ses frères sont, quant à eux, restés bergers du troupeau paternel… Lorsque la famine
frappe le pays de Canaan, ils descendent pour obtenir des vivres. Face à Yossef, les frères
ne le reconnaissent pas…
En voyant ses frères se prosterner à lui, il
se souvient alors de ses rêves. Il ne se révèle pas à eux immédiatement et se comporte
avec une grande rigueur à leur encontre.
C’est à ce moment que les frères de Yossef se livrent à un véritable examen de conscience
et attribuent leur sort à un châtiment divin.
À l’origine de la haine et de leur démarche, ils étaient pourtant convaincus de leur légitimité.
Il pensait que Yossef représentait un danger pour l’ensemble des valeurs familiales.
Désormais, ils pensent que si le vice Pharaon est si sévère c’est parce qu’ils ont manqué de
clémence dans l’exécution de leur décision. Ils reconnaissent donc que cette insensibilité
mérite un châtiment.
Lorsque Yossef exige de garder en captivité l’un des frères en attendant que les autres
ramènent Binyamin, ils se disent l’un à l’autre : « Certes, nous sommes coupables vis-à-vis
de notre frère, dont nous avons vu la détresse quand il nous implorait et nous n’avons pas
écouté ; voilà pourquoi ce malheur nous est arrivé ! »
Réouven s’adressa à eux en disant : « Ne vous avais-je pas parlé en disant : « Ne fautez
pas envers l’enfant’’ mais vous n’avez pas écouté ! Et voici que son sang nous est
maintenant exigé. »
Nos commentateurs nous font remarquer que ce détail de l’histoire ne nous a pas été
rapporté dans la Paracha de Vayéchev lorsque l’on nous relate l’histoire de la vente de
Yossef…
À aucun moment nous ne voyons Réouven demander explicitement à ses frères d’épargner
Yossef. Nous pouvons nous demander pourquoi la Torah fait l’impasse sur ce point pour y
revenir à ce moment du récit. De plus, ils ne semblent pas regretter d’avoir vendu Yossef
mais juste de ne pas avoir été sensibles à ses lamentations. Pourtant, cela ne semble être
qu’un détail mineur face à la gravité du geste !
Selon le Ramban Nahmanide, les frères étaient persuadés de la nécessité d’écarter Yossef
du projet familial, ils l’ont jugé en toute impartialité et avec intégrité morale. Cependant, leur
cœur ne pouvait rester insensible, face aux pleurs de leur frère, ils auraient dû le prendre en
pitié et l’épargner. L’auraient-ils entendu pleurer et crier sans qu’ils n’en soient touchés ?
Rétroactivement, c’est ce détail qui les tourmente fortement…
Si la Torah n’a pas précisé ce détail lors du récit de l’événement, c’est justement pour nous
faire comprendre à quel point les pleurs de Yossef n’ont ébranlé personne au moment où ils
se sont débarrassés de lui.

La Torah met tout de même en évidence la grandeur de ses hommes. L’événement s’était
produit 22 longues années auparavant mais pour autant, dès qu’ils constatent qu’ils sont
confrontés à une épreuve particulière, ils sont en mesure de rechercher dans leur
comportement antérieur ce qui peut leur être reproché…
Chabat Chalom
Rabbin Daniel Knafo