Parachat Vayé’hi

Quand Jacob avait quitté Beer Chéva pour ‘Haran, il s’était arrêté en route pour passer la nuit dans un lieu désert qui deviendrait un jour le site du Saint Temple. Ayant rassemblé douze pierres, il les avait placées tout autour de l’endroit où il allait s’allonger. Alors que, s’allongeant, il posait sa tête, les douze pierres avaient fusionnèrent pour n’en former qu’une seule. 

Des années plus tard, en Égypte, alors que Jacob était sur le point de mourir, il appela à son chevet ses douze fils. Ils se rassemblèrent autour de lui et les douze individus devinrent une âme unifiée. Ils prononcèrent la prière du Chéma devant leur père Jacob, lui assurant ainsi que les principes du service de D.ieu et de la reconnaissance de Son absolue Unicité seraient également vécus et enseignés par eux. Une famille unie, avec un seul cœur et une seule âme. 

Quand Jacob avait rassemblé ces douze pierres, sur le chemin de ‘Haran, il l’avait fait dans l’intention de s’attacher avec les douze fils qu’il devait avoir. De fait, le mot hébreu « évène » (pierre) est constitué de deux mots : « Av » (père) et « Ben » (fils), de sorte que le mot « pierre » contient la liaison du père et du fils. Suivant l’intention Divine, les douze pierres fusionnèrent : non seulement seraient-elles toujours liées à lui, leur origine commune, mais elles seraient également liées les unes avec les autres. 

Que signifie réellement cette fusion de pierres ? 

Il est clair que pour optimiser notre relation avec D.ieu, nous devons faire de même dans nos relations avec nos prochains. Quand l’unité en bas est la plus complète, cela permet – voire commande – aux bénédictions de se déverser. On nous apprend même que lorsque nos ancêtres furent unis dans l’idolâtrie, l’exil qui en résulta fut moins sévère que ce qui résulta du fait d’être immergés à la fois dans la Torah et dans des conflits internes – quantitativement par plus de 1900 ans, et qualitativement par plusieurs croisades, une Inquisition, la Shoah et malheureusement bien plus encore. 

Mais comment parvenir à cette unité essentielle ? Pour comprendre ce qui est attendu de nous, il nous faut contempler Celui auquel nous souhaitons ressembler. D.ieu créa le monde parce qu’Il désire une résidence ici-bas. Quel intérêt cela peut avoir pour Lui ? 

L’intérêt, en bref, c’est que lorsque, dans un lieu qui est le siège de tellement de contradictions apparentes et de diversité, on peut reconnaître Son Unité, cette reconnaissance est plus solide et plus réelle que les toutes les louanges qui Lui sont adressées dans les mondes supérieurs. L’Unité de D.ieu est en réalité exprimée par l’existence même d’une telle diversité au sein de la Création. Car une unité qui naît de la diversité a bien plus de réalité qu’une unité qui s’appuie sur l’uniformité. 

Jacob ne prit pas une grande pierre pour s’y étendre, pas plus qu’il ne donna une bénédiction unique à tous ses douze fils. Au contraire, il rassembla douze pierres distinctes et il donna douze bénédictions particulières « sur mesure » à ses douze fils et à leurs descendants. 

Dans les deux situations, il y eut un moment de fusion, de réunion dans une unité absolue. Ce fut une unité d’autant plus solide que la force de chaque individu restait intacte. Immédiatement après avoir prononcé « Chema Israël » comme un seul homme, les fils redevinrent à nouveau des âmes individuelles pour pouvoir recevoir leurs bénédictions respectives de leur père, qui allaient être les outils de leurs démarches individuelles dans ce monde. 

Il nous appartient d’apprendre à vivre avec les deux approches : les bénédictions individuelles et l’unité solide comme la pierre. Aucune ne pourra être vraie sans l’autre.